Afrofusion par un géant.
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De retour de mes vacances d’été, au détour du premier festival du genre: Afronation, dédié à la musique africaine diasporique, ce serait une trahison envers moi-même et envers les lecteurs d’Audiomatic que de ne pas écrire au sujet de ce géant africain qui est arrivé à maturité et qui est dans le courant dominant de la musique mondiale. Après tout, j’ai appris le Shaku et le Zanku durant Afronation et voici ma manière de le rendre.
Burna Boy est un géant africain qui bouscule les catégories musicales occidentales. Il offre une liaison entre le personnel et le politique dans la nouvelle catégorie de la musique que l’on peut nommer afro-fusion: un mélange contagieux d’afrobeats, de rythmes dancehall, de reggae, de rap et de R&B qui représente les influences formatrices de Damini Ogulu.
La musique répandue dans les nombreuses cultures de l’Afrique de l’Ouest a souvent été mal classée, regroupée sous la bannière raciste de «musique du monde» ou totalement ignorée. Il existe toujours des confusions autour de l’Afrobeat de Fela Kuti et du genre pop actuel, AfrobeatS. Burna Boy, se situe quelque part entre l’espace ambigu de ce «S». Il est un omnivore musical qui a quitté le Nigéria pour vivre et apprendre à Londres mais ne s’est jamais égaré trop loin de chez lui.
https://www.youtube.com/watch?v=1Se1yDLqtUE
Lorsque sa mère a accepté, en son nom, le prix du meilleur artiste international de BET (catégorie mal définie qui renforce à quel point nous sommes une société sans engagement en ce qui concerne la plupart des musiques importées non blanches), elle a rappelé à un public rempli de musiciens noirs qu’ils font partie d’un ensemble plus vaste: « Je crois que le message de Burna serait que chaque Noir devrait se rappeler que vous étiez Africains avant de devenir autre chose. » Cette idée de retracer tous les noirs jusqu’à la source africaine est au cœur du nouvel album de Burna Boy: African Giant. Les paroles de sa mère, extraites du discours de BET, sont les dernières prononcées sur l’album.
La musique de Burna Boy traverse la diaspora avec un pouvoir unificateur. Cela commence par l’Afrique de l’Ouest puis s’allonge vers l’extérieur. Alors qu’il utilisait fréquemment l’anglais auparavant, il chante principalement en Pidgin, Yoruba et Igbo et entraîne des invités de partout dans son monde polyrythmique distinctif: le Nigérian Zlatan et le Ghanéen M. Angifest, Angélique Kidjo, la légende du reggae Damian Marley et le chanteur de dancehall Serani, Jorja Smith au Royaume-Uni, outre-Atlantique avec Jeremiah, YG et Future. Il a décrit le fait d’entraîner ces deux derniers dans l’Afro-fusion comme «ramenant mes frères à la maison».
Burna Boy prend position non seulement dans l’héritage musical hyper-diversifié africain, mais il explore aussi l’histoire mouvementée du Nigéria. Après tout, il ne peut pas vraiment être un géant africain sans prendre position à l’égard du pouvoir politique et économique, et il passe une grande partie de l’album à revisiter les récits qui entourent le Nigéria depuis son indépendance en 1960. Aucune séquence ne l’incarne mieux que le double volet: «Wetin Man Go Do» et de «Dangote»; et comme tous les africains relativement conscients Burna Boy est déchiré entre sa propre quête de richesses et l’injustice sociale et politique.